Interview de Michaël Malka dans le Guide du e-commerce Touléco 2014

09:02 05 janvier in e-commerce

Interview de Michaël Malka dans le Guide du e-commerce Touléco 2014

Existe t-il une forme juridique d’entreprise plus adaptée au e-commerce ?

Pas vraiment. Le choix du statut juridique de l’entreprise dépend essentiellement de la taille du projet et des souhaits du créateur en ce qui concerne la gestion et le fonctionnement de sa structure. Ainsi, au moment de la création de son entreprise, le cyber-commerçant va devoir se poser les questions auxquelles est habituellement confronté tout chef d’entreprise.

L’entreprise doit-elle être créée par une seule personne ou par plusieurs associés ? Existe-t-il un patrimoine à protéger ? Quel va être le capital de départ ? Quel va être le statut social et fiscal du chef d’entreprise ? Existe-t-il une volonté de céder la structure à moyen terme ? En fonction de la réponse à ces questions, le choix du cyber-commerçant se portera sur l’une des formes classiques d’entreprise à savoir l’entreprise individuelle, la SARL, la SAS etc. Si le choix se porte sur une forme sociale, il conviendra tout de même de prévoir un capital social suffisamment important pour rassurer les cyber-consommateurs, lesquels sont de plus en plus attentifs aux informations figurant dans les mentions légales du site internet.

A ce propos, quelles sont les informations qui doivent figurer dans les mentions légales ?

Les mentions légales d’un site internet d’e-commerce doivent obligatoirement préciser l’identité de l’entreprise éditrice du site, le nom du directeur de la publication ainsi que l’identité de l’hébergeur du site. Toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés doit indiquer sur son site internet la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée, ainsi que son numéro unique d’identification et le lieu de son siège social. Le directeur de la publication est la personne qui engagera sa responsabilité si des infractions du type diffamation ou injure sont commises sur le site internet. Cela peut malheureusement arriver lorsque le cyber-commerçant ouvre un espace de discussion au sein de sa boutique virtuelle. Toutes ces indications doivent être facilement accessibles sur le site, sous la rubrique « mentions légales », véritable « ours numérique », tout à fait comparable à l’ « ours » d’un journal. Grâce à ces mentions, les auteurs et éditeurs de contenus sont identifiables et joignables par toute personne qui voudrait demander, soit le retrait d’un contenu mis en ligne, soit un droit de réponse à ce contenu. Enfin, il faut également souligner que ces « mentions légales » sont de nature à rassurer le cyber-consommateur qui peut ainsi identifier aisément l’entreprise auprès de laquelle il envisage d’acquérir un produit ou un service.

Quelles sont les autres mentions qui doivent figurer sur un site d’e-commerce ?

Dans la mesure où un site internet constitue un service de communication en ligne, tout site web, qu’il soit marchand ou non, devrait comporter des conditions générales d’utilisation (CGU). Ces conditions ont pour objet d’encadrer l’activité du cyber-visiteur sur le site et de rappeler à ce dernier les droits dont il bénéficie. Cela étant, la plupart des cyber-commerçants ont pris l’habitude de fusionner les conditions générales d’utilisation et les conditions générales de vente dans un souci de simplification. Ainsi, lorsque le cyber-commerçant propose uniquement des services sur son site, il sera habituel de ne trouver sur le site que des conditions générales d’utilisation déterminant le cadre juridique de la commercialisation des services. Lorsque le site web propose uniquement la vente de biens, ne figurent en général que des conditions générales de vente (CGV) ayant pour objet d’encadrer la commercialisation des produits. Dans tous les cas, ces conditions générales devront impérativement informer le cyber-consommateur sur ses droits et obligations en ce qui concerne notamment les commandes, les modalités de paiement, les modalités d’expédition et de livraison, les garanties, le droit de rétractation etc. Enfin, afin que la transaction réalisée sur le site soit valable, il est nécessaire que le cyber-consommateur ait préalablement accepté lesdites conditions générales.

Quels sont les points à ne pas négliger du point de vue de la propriété intellectuelle ?

L’écueil classique consiste à omettre d’acquérir les droits de propriété intellectuelle sur son site internet auprès du concepteur de celui-ci. En effet, un site internet est considéré par le droit comme une œuvre de l’esprit protégeable, à ce titre, par le droit d’auteur. Or, le code de la propriété intellectuelle exige que soit respecté un certain nombre de formalités pour qu’une transmission de droits d’auteur soit juridiquement valable. Bien souvent, le cyber-commerçant ayant eu recours au service d’un concepteur de site internet ne dispose, une fois la prestation réalisée, que d’un devis signé et d’une facture. Ces documents ne sont pas suffisants pour permettre une cession des droits de propriété intellectuelle sur le site internet. Ainsi, de nombreux cyber-commerçants ont eu la surprise de constater, au moment de la cession de leur entreprise, qu’ils n’étaient pas titulaires des droits de propriété intellectuelle sur leur site web d’e-commerce. La situation peut toujours être régularisée en prévoyant une cession rétroactive des droits avec le concepteur pour autant que celui-ci existe toujours au moment où cette transmission des droits est envisagée…

Quelles sont les obligations d’un cyber-commerçant en matière de données personnelles ?

La première obligation d’un cyber-commerçant va être de déclarer à la CNIL son système de traitement automatisé de données personnelles. En effet, à partir du moment où le cyber-commerçant collecte des données permettant d’identifier une personne physique, comme une adresse mail, un numéro de téléphone, une adresse etc. il devient nécessairement éditeur d’un fichier soumis à la loi informatique et liberté. Par ailleurs, le cyber-commerçant aura l’obligation d’assurer la sécurité de ces fichiers, la confidentialité des données, mais aussi de respecter la finalité des traitements ainsi que la durée de conservation des informations. Toutes ces obligations sont sanctionnées pénalement. Enfin, il conviendra d’informer les cyber-consommateurs de leurs droits, à savoir notamment le droit d’accès et de modification des données personnelles. Naturellement, l’éditeur du site internet devra permettre aux utilisateurs d’exercer effectivement ces droits en leur indiquant, en général, une adresse de courriel dédiée à cette fin.

Comment gérer sa e-réputation ?

Le cyber-commerce a bouleversé les habitudes des consommateurs en transformant la pratique du « bouche à oreille », usuelle dans le commerce traditionnel, en véritable « écho numérique », lequel est susceptible de résonner parfois durant des années sur la toile. Ainsi, la pratique de la notation des vendeurs et celle des « posts » d’avis de consommateurs est devenue systématique. Cette évolution du commerce est plutôt positive dans la mesure où elle permet à des milliers voire des millions de consommateurs d’échanger sur la qualité des produits et services proposés sur la toile. Cependant, ces espaces de discussion se transforment parfois en véritable « défouloir électronique » pouvant s’avérer extrêmement préjudiciable pour un cyber-commerçant. Aussi, il existe des moyens juridiques très efficaces de faire supprimer dans un délai très court un commentaire qui dépasserait les limites de la liberté d’expression en mettant en demeure l’hébergeur du site sur lequel figure le message litigieux. Toutefois, il est vivement recommandé de recourir à un conseil spécialisé aux fins de rédiger cette mise en demeure qui doit respecter un formalisme très strict et être argumentée par un raisonnement juridique.

Propos recueillis par Agnès Frémiot

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